Le second tour de la présidentielle iranienne du 5 juillet oppose deux figures emblématiques des courants politiques du pays : le réformateur Massoud Pezeshkian et l’ultraconservateur Saïd Jalili. Malgré leurs différences évidentes, tous deux ont adopté un discours soigneusement calibré, restant fidèles au guide suprême et aux principes de la République islamique, mais affichant des positions divergentes sur le dialogue avec les États-Unis.
Massoud Pezeshkian, jusqu’ici peu connu du grand public, a surpris beaucoup d’observateurs en atteignant le second tour. Le 28 juin, il est arrivé en tête du premier tour avec 42,5 % des voix, profitant de la dispersion des votes conservateurs entre plusieurs candidats. Ancien ministre de la Santé sous le réformateur Mohammad Khatami et député de Tabriz, cet homme politique de 69 ans a su s’imposer comme le représentant de la modération.
Face à lui, Saïd Jalili représente la ligne dure du régime. Proche du guide suprême Ali Khamenei, il occupe des postes clés au sein de l’appareil sécuritaire et s’est fait connaître pour son intransigeance, notamment lors des négociations sur le nucléaire iranien. Son discours est marqué par une ferme opposition à l’Occident.
Malgré une légitimité affirmée par le soutien d’anciennes figures réformatrices comme Mohammad Khatami et Mohammad Javad Zarif, Pezeshkian peine à rassembler tous les réformateurs. De nombreux électeurs, désillusionnés par l’absence de changements réels, risquent de bouder les urnes. Plusieurs figures emblématiques, dont Mir Hossein Moussavi et la prix Nobel de la paix Narges Mohammadi, incarcérée, appellent même au boycott.
Connu pour son franc-parler, Pezeshkian a pourtant évité de franchir certaines lignes rouges pendant sa campagne. Il s’est démarqué par son ouverture au dialogue avec l’Occident, insistant sur la nécessité de négocier avec les États-Unis pour lever les sanctions et relancer l’économie, tout en respectant les directives du guide suprême.
En Iran, le président dispose de pouvoirs limités par rapport au guide suprême, qui reste le véritable chef de l’État. La décision de signer des accords internationaux, comme celui sur le nucléaire, revient à ce dernier. Ce système limite la capacité de Pezeshkian à mettre en œuvre les réformes qu’il propose, ce qu’a critiqué indirectement Ali Khamenei durant la campagne.
Saïd Jalili, vétéran de la guerre Iran-Irak, met en avant son sacrifice pour la nation et adopte une ligne dure vis-à-vis de l’Occident. Proche d’Ali Khamenei, il prône une fermeté accrue sur les questions sociétales, y compris le port du voile, à l’opposé de Pezeshkian qui appelle à une ouverture sur cette question.
La détérioration de la participation électorale en Iran est palpable avec une abstention frôlant les 60 % lors du premier tour, malgré l’extension des horaires de vote. Beaucoup d’Iraniens, notamment les jeunes, croient que leur vote n’aura pas d’impact sur leur vie quotidienne, le vrai pouvoir restant entre les mains du guide suprême.
Le duel entre Pezeshkian et Jalili déterminera le futur visage de l’Iran sur la scène internationale. Si Saïd Jalili l’emporte, le pays pourrait retrouver une posture ultranationaliste similaire à celle de Mahmoud Ahmadinejad, tandis qu’une victoire de Pezeshkian pourrait ouvrir la voie à un dialogue renouvelé, bien que limité, avec l’Occident.
Donnez votre avis !