Depuis leur victoire aux élections législatives le 7 juillet, les dirigeants du Nouveau Front populaire (NFP) ne cessent de promettre l’abrogation immédiate de la réforme des retraites qui a repoussé l’âge légal de départ à 64 ans. L’eurodéputée LFI Manon Aubry a même déclaré sur RTL le 8 juillet que cela pourrait être fait « en une heure par décret ». Selon elle, abroger cette réforme serait « la toute première chose que ferait notre nouveau Premier ministre ».
Toutefois, selon Jean-Paul Markus, professeur de droit public à l’université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, « abroger la loi par décret en une heure » est un non-sens juridique. Un décret ne peut légalement abroger une loi, et ce type de langage constitue un raccourci inadéquat. La situation devient d’autant plus complexe lorsque l’on examine les propositions concernant les décrets d’application, comme ceux évoqués par Clémence Guetté et Éric Coquerel, députés réélus du NFP-LFI.
Clémence Guetté a mentionné l’abrogation des décrets d’application de la réforme des retraites, mais cela pourrait réintroduire d’anciens décrets qui ne sont plus en conformité avec les lois actuelles. « Abroger les décrets d’application de la réforme des retraites ferait réapparaître dans l’ordre juridique d’anciens décrets », explique Jean-Paul Markus. Cette situation pourrait mener à l’illégalité, car ces anciens décrets ne correspondent pas aux objectifs de la loi de 2023.
Pascal Caillaud, chargé de recherche au CNRS en droit social, souligne que même si un décret est supprimé, les échéances légales demeureront applicables. « L’augmentation de l’âge légal, c’est trois mois de plus par année de naissance », rappelle-t-il. L’article L161-17-2 du Code de la Sécurité sociale, qui découle de la réforme de 2023, garantit que l’âge de départ pour les assurés augmente progressivement en fonction de leur année de naissance, rendant vaine toute tentative de modification par décret isolé.
Une autre option évoquée par Olivier Faure consiste à utiliser l’article 49.3 pour abroger la réforme des retraites. Bien que cela soit possible légalement, cela comporte un risque politique élevé. Un gouvernement NFP qui engagerait sa confiance sur cette question pourrait tomber en raison de l’absence de majorité à l’Assemblée nationale.
En conclusion, bien que la volonté d’abroger la réforme des retraites soit forte parmi les responsables du Nouveau Front populaire, les contraintes juridiques et politiques rendent cette tâche ardue et potentiellement illégale selon les spécialistes du droit.
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